Évaluer les managers

L’entretien d’appréciation est l’occasion pour le manager de recevoir un retour précis sur ce que l’entreprise pense de la manière dont il remplit sa mission et sur ce qu’elle attend de lui. Il permet à son hiérarchique de faire le point sur l’aide qu’il peut apporter à son collaborateur, ainsi que sur les objectifs qu’il lui fixe.

L’entretien d’appréciation doit remplir un certain nombre de conditions pour atteindre ses objectifs, sinon il risque d’être vécu comme une formalité, voire une contrainte inutile :

  • En premier lieu, il ne doit pas être le seul moment d’échange et de feed-back entre le manager et son hiérarchique. Sinon, l’entretien risque de se révéler très « tendu », l’un et l’autre des interlocuteurs se préparant à parer toute éventuelle attaque. Normalement, un entretien d’appréciation ne devrait pas révéler de grosses « surprises » ni pour l’un, ni pour l’autre. Ce qui signifie que tout problème important aura été traité au moment où il est apparu, et non pas « gardé en réserve », comme une munition, en vue de l’entretien annuel.
  • L’entretien porte sur une durée donnée, la plupart du temps annuelle. Le risque important est de n’évaluer que les dernières semaines, voire les derniers jours, et à rester dans le domaine des « impressions » subjectives. Ce qui peut, d’une part, inciter le hiérarchique du manager à se focaliser sur un incident marquant des derniers jours, au détriment de la performance globale. Et d’autre part, le manager peut être tenté de concentrer son énergie sur les jours qui précèdent l’entretien, afin de donner une bonne image de lui.
    Là encore, le seul moyen pour éviter cet écueil consiste pour le hiérarchique à s’intéresser – tout au long de l’année – à la manière dont son collaborateur remplit sa mission de manager.
    Ainsi, le moment de l’appréciation apportera au manager un réel feed-back, comportant des faits concrets et observés, portant sur ses points d’amélioration, mais aussi sur ses points forts. De plus, rien n’empêche de prévoir plusieurs points intermédiaires au cours de l’année.
  • Par ailleurs, un des risques majeurs de ce type d’entretien consiste à évaluer le manager uniquement sur des résultats quantitatifs. Par exemple du chiffre d’affaires ou de la marge pour un manager commercial, des unités produites ou des taux de rebuts pour un responsable de production, ou des délais respectés pour un manager comptable ou informaticien.
    Le résultat chiffré est bien sûr important, puisque c’est lui qui va amener du chiffre d’affaires pour l’entreprise. Mais ce n’est pas un indicateur suffisant. En effet, un manager peut – à court terme – atteindre d’excellents résultats, sans pour autant manager correctement son équipe. Par exemple, il peut produire lui-même le résultat (c’est souvent le cas de managers commerciaux), ou bien encore faire produire ces résultats par son équipe, mais au prix d’un management autocratique et démotivant. Dans ces deux cas, le manager n’utilise ni ne développe les compétences de son équipe, ce qui représente un risque important sur le moyen et le long terme.

A l’inverse, des résultats moyens obtenus dans un contexte difficile, assortis d’un travail – nécessairement long et moins visible – sur le développement des compétences de ses collaborateurs, doivent être reconnus comme une performance.

Le domaine d’application de l’évaluation doit donc être cohérent avec la politique managériale de l’entreprise, ce qui suppose :

  • Que ce sont bien les compétences managériales qui sont évaluées, l’idéal étant d’apprécier celles-ci au regard du référentiel des compétences requises.
  • Que les objectifs fixés soient bien des objectifs de management !
    Certaines entreprises n’hésitent pas à dissocier le point sur les résultats quantitatifs  de l’entretien d’appréciation. Par exemple, les responsables d’unité commerciale se voient fixer leur budget indépendamment des objectifs issus de l’entretien d’appréciation.

Même si toutes ces précautions sont prises, l’entretien d’appréciation présente néanmoins des limites.

  • L’effet de halo[1] qui amène le hiérarchique à élaborer une impression générale sur le manager, mais sans parvenir à faire la distinction entre les différentes compétences mises en œuvre.
  • L’existence d’à priori qui font que le hiérarchique aura une meilleure appréciation envers un collaborateur qu’il apprécie et qu’il trouve sympathique, plutôt qu’envers un autre avec lequel il ne « s’entend » pas. Cet élément est confirmé par les différences d’évaluation effectuées vis-à-vis d’une même personne par des hiérarchiques différents.
  • La vision nécessairement partielle qu’a le hiérarchique sur son collaborateur. En effet, beaucoup d’actes de management se font – heureusement – hors de sa présence et il lui est donc difficile d’avoir une idée très complète de son collaborateur. Il va donc l’évaluer, sur ce qu’il a pu observer, et éventuellement sur des éléments « déclaratifs ».

Cette dernière limite donne tout son intérêt à un autre type de feed-back, complémentaire de l’évaluation par le hiérarchique : l’évaluation à 360°.


[1] Levy-Leboyer C, La gestion des compétences, Editions d’Organisation, 1999

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